Souvent, le constat s’impose à nous … la situation actuelle n’est plus viable; il faut évoluer, avancer, … en d’autres mots CHANGER.
Cela n’est déjà pas évident du tout si ce simple constat ne nous concerne que personnellement … Que dire alors si ce constat concerne notre groupe, notre équipe ou même notre organisation.
Induire un changement organisationnel ne s’improvise pas. Cette opération doit se préparer, se réfléchir, se planifier … et se conduire comme un projet (de changement).
De même, un projet va, de par sa nature même, occasionner dans l’organisation dans laquelle il est mené un certain nombre de bouleversements (du changement) qui vont de manière plus ou moins profonde impacter le travail et les habitudes de ses membres.
Il ne faut donc jamais sous-estimer l’impact du changement sur les « gens », même s’il s’agit d’une évolution positive. La résistance au changement est une réaction humaine, normale et donc prévisible. Il est donc possible de préparer l’organisation à affronter, à accepter et à profiter pleinement de ce changement.
Prenons comme exemple l’implémentation dans une société d’un GED (Gestionnaire Électronique de Documents) qui ne manquera pas de révolutionner les procédures en vigueur, les habitudes des employés voire même l’organisation et le fonctionnement général de l’entreprise. Considérer cette opération comme une simple opération technique serait une erreur considérable mettant en danger sa réalisation et sa réussite.
Le chef d’un tel projet ne peut donc pas négliger la résistance (au changement) que son projet peut occasionner ainsi que les risques et retards qu’elle peut et va induire. Il doit donc obligatoirement inclure une réflexion sur la manière de faire accepter le résultat de son projet et il doit impérativement développer et appliquer un plan d’actions adhoc (Change Management Plan).
Des années d’observation et d’analyse de la façon dont les entreprises et leurs leaders conduisent le changement, avec des succès variés, ont permis à John P. Kotter (Harvard Business School) d’identifier huit étapes clés pour y parvenir avec efficacité. Ces grands principes sont naturellement exportables au monde de la gestion de projet et fournissent le cadre de référence idéal pour l’élaboration et la mise en œuvre d’un « Change Management Plan ». Ce n’est pas nouveau mais cela reste d’une pertinence très actuelle.
Le modèle de Kotter prévoit trois phases successives (et au total huit étapes) dans la mise en œuvre d’un changement.
1. Créer et mettre en place un climat favorable au changement.
a. Conscientiser sur le sens de l’urgence ou faire naître le rêve …
Pour assurer une mobilisation suffisante, il est essentiel que chacun ressente que le statu quo est inacceptable ou que le futur proposé est enviable. Les membres de l’organisation doivent prendre conscience que changer est nécessaire et même urgent. Ce changement dit être présenté comme un réel progrès et qu’il est inacceptable/dangereux d’attendre passivement. A défaut, dès que les premiers obstacles surgiront, beaucoup trouveront rapidement d’excellentes raisons de ne pas faire d’efforts. Il faut donc créer un sentiment d’urgence et/ou faire naître le rêve… Par exemple, en créant une crise, en démontrant les risques du statu quo, en incitant les membres de l‘organisation à rencontrer des clients, des fournisseurs ou des actionnaires insatisfaits ou encore décrivant une situation meilleure après mise en œuvre du projet de changement …
b. Créer un « change team » …
Aucun dirigeant, aucun cadre aussi brillant soit-il, ne rassemble à lui seul l’aura et les ressources nécessaires pour mener à bien seul le changement. Il est donc nécessaire de former une coalition avec d’autres personnes qui regroupera l’ensemble des talents nécessaires : le pouvoir, l’expertise, le leadership, la communication, la crédibilité, la confiance, … Ce seront vos champions du changement …
c. Développer une vision, une stratégie…
Pour mobiliser les hommes et les femmes de son entreprise vers le changement, le change manager doit définir une vision, c’est-à-dire une description de l’avenir recherché, qui soit ambitieuse, mais réaliste, précise et souple. L’objectif est de montrer objectivement et honnêtement que demain sera mieux (du moins pas pire ) qu’aujourd’hui en insistant sur les plus-values qu’apportera le changement. Cette vision et la stratégie associée permettent de décrire et faire comprendre vers où et comment on veut évoluer.
2. Engager et mettre en mouvement l’organisation
d. Communiquer la nouvelle vision
Pour produire ses effets, la vision doit être partagée, comprise et acceptée par l’ensemble des personnes clé de l’organisation. Le chef de projet doit donc faire d’importants efforts de communication et de dialogue pour capter l’attention des employés trop souvent englués dans la routine. La connaissance et la compréhension de cette vision motiveront chacun à fournir les efforts nécessaires et fixeront la direction générale à suivre. Le responsable du projet de changement doit communiquer et encore communiquer en tirant parti de toutes les occasions et en utilisant tous les canaux disponibles (formels et informels) : grands meetings, petits comités, newsletters, mémos, discussions informelles, pauses café, etc.
e. Consolider le changement en levant les obstacles
Le chef de projet doit constamment veiller à lever rapidement les obstacles les plus importants, pour que les équipes opérationnelles puissent continuer mener à travailler sereinement. L’inertie au changement est en général énorme. La machine du changement a besoin de temps pour atteindre sa vitesse de croisière. Les obstacles au changement doivent être anticipés et écarter au plus vite afin de ne pas stopper ou ralentir le processus d’évolution en cours. Une analyse des stakeholders et une analyse de risques peuvent aider à identifier au plus tôt les obstacles potentiels.
f. Générer des profits et des résultats à court terme
Pour conserver dans la durée la mobilisation de tous et pour séduire/convaincre les sceptiques, il est essentiel de s’attacher à rapidement obtenir des résultats (succès) intermédiaires visibles (par exemple, par le biais de test case bien choisis). Ils démontreront que le changement visé est possible et qu’il apportera, in fine, une amélioration sensible du fonctionnement.
3. Appliquer et entretenir le changement
g. Bâtir sur les premiers résultats pour accélérer le changement
Les succès intermédiaires sont des accélérateurs de succès qu’il faut exploiter et progressivement multiplier. S’ils ont été bien choisis, ils pourront servir de socle à l’implémentation de nouveaux succès qui faciliteront l’acceptation du changement visé et donc son implémentation globale. Il est indispensable d’entretenir et d’accélérer la dynamique de changement. Pour cela, il ne fait pas hésiter à accélérer le mouvement en lançant de nouvelles initiatives.
h. Ancrer les nouvelles approches dans la culture de l’entreprise
Pour opérer un changement durable, il faut ancrer les nouvelles pratiques dans la culture de l’organisation. Mais cette évolution ne peut se faire qu’à la fin du programme de changement car de nouvelles valeurs ne peuvent s’instaurer que si elles reposent sur de nouvelles façons de faire, au succès incontestable et démontré.
Le changement est comme une boule de neige dévalant une colline. Au début la boule est minuscule et sa vitesse sur la pente est faible. La faire avancer demande encore beaucoup d’effort et il est encore très simple de la bloquer … Si on désire que cette boule de neige arrive effectivement au bas de la colline, c’est lors du lancement de la descente qu’il faudra lui apporter le plus d’attention (créer l’urgence, lever les obstacles) et d’énergie (Change Team, Communication) et qu’il faudra lui choisir la bonne voie/direction (Vision et stratégie). Si elle est bien guidée, la boule prendra de la vitesse et du poids (premiers succès) en dévalant la pente. Elle gagnera en inertie (bâtir sur les premiers succès) jusqu’à emporter tout sur son passage et ne plus vraiment pouvoir être arrêtée …